La faiblesse des banques italiennes avait été déjà soulignée par les stress tests de la BCE d’octobre 2014, mettant en doute 9 banques sur les 15 plus importantes en Italie. Le pays fait face à une accumulation de crédits douteux, notamment pour UniCredit qui a elle seule en détient 14%. La commission de Bruxelles menace d’ouvrir une enquête sur les banques italiennes et les aides que l’Etat serait amené à lui fournir. Pourquoi l’Etat italien est dans l’obligation de venir en aide aux banques italiennes ?

Les actifs d’impôts différés (DTAs : deffered tax assets) sont présents en très grand nombre dans les fonds propres durs des banques italiennes (Common Equity Tier 1) et représenteraient de 150 à 200 points de base du ratio. Les DTAs occupent la même position dans le bilan des banques en Espagne, au Portugal et en Grèce. Les actifs d’impôts différés représentent des crédits d’impôts que les banques ont pu mettre en place pour couvrir leurs pertes lors de la crise et ces crédits servent à réduire leur endettement lorsque ces banques auront retrouvé un certain niveau de rentabilité. Cela signifie donc que les DTAs ne sont absolument pas liquides en cas de stress sur les marchés financiers.

Pourquoi de tels crédits ont pu être inscrits sur les fonds propres des banques en ce cas ? L’autorisation d’inscrire ces DTAs aux fonds propres durs provient d’une réglementation fixée en 2013 par l’Union Européenne qui estime qu’en retour, l’État doit se porter garant pour ces banques présentant des DTAs dans leurs fonds propres. La recapitalisation des banques est ainsi facilitée sans avoir recours à une levée de fonds sur les marchés et le problème d’actifs risqués est ainsi évacué.

Il est donc question actuellement de supprimer les DTAs des fonds propres des banques. A titre d’exemple, les DTAs représentent 10% des fonds propres italiens et 20% pour la Grèce. Ainsi pour atteindre les quotas de fonds propres fixés par Bâle III (sans les DTAs), les banques secondaires se verraient dans l’obligation de lever des fonds soit par la vente de dette souveraine soit par recapitalisation. Or les banques secondaires en Italie détiennent des obligations d’État italiennes qui représentent plus de 90% de leur portefeuille en dettes souveraines. Rappelons que la dette italienne est considérée comme étant relativement risquée (comparée à la dette souveraine allemande ou française par exemple), sa vente ne ferait donc qu’accroître la perception comme étant un titre risqué sur le marché et rendre donc le remboursement de cette dette plus difficile car devenu plus coûteux.

Cette situation problématique s’est développée avant la mise en place du quantitative easing de la BCE de janvier 2015 puisque les banques secondaires ont servi de créanciers en raison de la politique des liquidités alors mise en œuvre. L’achat de dettes souveraines a bien entendu été fait au détriment du secteur privé. Il émerge par ailleurs la nécessite de trouver un prêteur en dernier ressort adapté pour les États et qui ne mette pas en péril le financement du secteur privé.

Les banques italiennes doivent vendre des dettes souveraines italiennes à hauteur de 200 milliards de dollars pour couvrir le risque pris précédemment avec les DTAs. La couverture du risque serait donc assurée par l’achat de dettes souveraines moins risquées comme le conseille Danièle Nouy, présidente du Comité de Supervision du mécanisme de supervision unique de la BCE, telles que les dettes allemandes ou françaises.

Le problème italien actuel émerge en grande partie à cause de la politique de la BCE qui ne présente pas de cap clair puisqu’elle encourage parfois les banques à prendre des risques, comme cela est le cas avec la mesure de 2013, ou cherche à assurer la stabilité et une certaine sécurité dans le système financier, comme le retour opéré sur les DTAs et la menace de la Commission Européenne. Cette situation met également en avant l’importance de séparer les banques secondaires privées et l’État (que ce soit pour un refinancement possible des banques ou pour un financement organisé de la dette publique).